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« (…) Née de l’interrogation et du doute, l’œuvre plastique de Ferit Iscan s’est construite dans l’inconfort moral : nullement linéaire, elle est faite de brisures, de volte-faces, d’incursions perpétuelles dans l’incertain, comme si le peintre, se refusant à tirer tout dividende de ses réussites, n’y voyait qu’une invitation à fuir (…)
« C’est ainsi qu’après une première période figurative encore marquée par le ‘plomb et le fil de fer’ de l’après-guerre, il se tourne vers l’abstrait, avec lequel il rompra en 1967-1968, à la faveur d’un épisode baroque, inopiné et jubilatoire, dit ‘Suite Versailles’ (Suite Versailles) ou ‘Âge Mansart’.
« Suit une longue est subtile tentative de reconquête de la figure à travers la géométrie : phase de distanciation, d’encagement des sujets (Les boîtes), d’anamorphoses, de perspectives réelles ou subversives, bref, d’une réappropriation au second degré de l’expression figurée (Corps éperdus, Souvenirs fugaces, Nus). Jusqu’au jour où, tout complexe de modernité aboli, le peintre osera ceci d’inouï : peindre, comme Ruysdaël, les rives de la Dordogne (Paysages).
« C’est la facture qui donne son unité profonde à cette oeuvre complexe : un métier de peintre parfaitement dominé et sûr, produit, sans doute, d’un long et invisible apprentissage. Qu’il brosse une nature morte (Natures mortes), un nu (Nus), un paysage (Paysages), Iscan réussit à coup sûr ce miracle de donner à voir une oeuvre aboutie sous l’apparence enlevée de la pochade. A l’instar d’illustres devanciers – Hals,
Fragonard, Daumier – ce talent d’exception allie la prestesse du spadassin à la profondeur méditée du philosophe (…) »
Michel Delignat-Lavaud